Choisissant un sujet de ‘droit communautaire’, comme on disait à l’époque, Robert Kovar, alors jeune Maître de conférences agrégé à la Faculté de droit et des sciences économiques de Nancy – selon la titulature de l’époque -, dont je connaissais la thèse sur <Le pouvoir réglementaire de la CECA>, et que je sollicitais, me fit l’honneur de diriger la mienne.
De ces moments déjà anciens, je garde encore un vif souvenir. Un accompagnement sans pression, une grande disponibilité, sans concessions mais avec toujours le crible d’un examen critique et scrupuleux de mes idées, une acceptation de celles-ci, même si elles ne correspondaient pas toujours aux siennes.
Dans cet attelage inégal que constituent le directeur et son thésard, Robert Kovar a toujours su me laisser l’entière liberté de mes positions tout en m’apportant en permanence le fruit de ses lectures et de ses réflexions. Le dialogue qu’il menait avec moi a été incontestablement fructueux, et j’y ai puisé maintes sources d’inspiration. Et peut-être que le souvenir de ces moments m’a accompagné lorsqu’à mon tour j’ai eu la responsabilité de diriger des thèses ?
Comme dans les anciennes corporations, notre métier s’acquiert par l’exemple : nul doute que celui que Robert Kovar m’a donné pendant les années de préparation de ma thèse ne m’ait été bénéfique, plus tard, dans ma carrière !
Vlad Constantinesco, Professeur émérite de l’Université de Strasbourg, Premier thésard de Robert Kovar cf. notre infographie
Le Professeur Robert KOVAR fut d’abord mon professeur de droit matériel de l’UE et de droit de la concurrence, qui me paraissait à l’époque une bien troublante énigme et que j’enseigne pourtant aujourd’hui. Je lui dois un enseignement par l’échange, par la critique, avec une dose d’humour, si importante pour relativiser le raisonnement juridique quand il devient un peu aride.
Il fut ensuite mon directeur de thèse, un directeur toujours à l’écoute, qui savait guider sans imposer ses vues, qui savait critiquer sans détruire. Un directeur impliqué, attentif et discret. Ce que l’on appelle aujourd’hui un enseignant-chercheur, qui nourrit certes ses enseignements de ses recherches mais qui cherche en fonction de ce que lui révèle son enseignement.
Le Professeur KOVAR m’a appris deux choses, que j’essaye de faire vivre dans mes enseignements ou avec mes thésards : la modestie de ce que l’on croit savoir et la vertu du travail collaboratif où l’essentiel n’est pas le nom de celui qui écrit mais le contenu de ce qui est écrit ou dit.
A réfléchir un peu sur cet héritage, il m’apparaît que sa pratique du droit, comme sa conception du travail de recherche et de transmission sont résolument modernes et profondément humains. Sans aucun doute bien plus que les MOOC qui sont à bien des égards du monde d’hier.
Fédérique Berrod, Professeure de droit à l’Institut d’Etudes politiques de Strasbourg, directrice de la Fédération recherche, L’Europe en mutation et membre du Centre des études internationales et européennes, la dernière thésarde du Professeur Robert Kovar, cf. notre infographie
Témoigner du Professeur Robert Kovar en tant que directeur de ma thèse m’oblige à me référer d’abord à sa méthode scientifique. Aucune démarche raisonnée ne peut parvenir à la véracité d’une proposition théorique qu’à l’intérieur d’une taxonomie basée sur des principes et des idées. Or, rassembler, organiser et systématiser rigoureusement toutes les thèses et antithèses élaborées par la jurisprudence et la doctrine revient à pouvoir synthétiser, voir théoriser. Toutefois, et c’est ma seconde référence, possédant l’art de tester ou de créer une théorie n’est pas suffisant pour la science du droit de l’Union. Le Professeur Kovar, en tant qu’incomparable théoricien de ce droit, était avant tout un grand inspirateur d’une Europe prospère, paisible et juste. Vu sous cet angle, les grands bouleversements de l’Europe qui remettent en question notre manière de voir le monde ne peuvent que valoriser davantage l’idée européenne consistant à mettre en application les lois éternelles de la fonction parfaite de la société humaine.
Asteris Pliakos, Professor of European Law, Department of International and European Economic Studies, Athens University of Economics and Business
Le professeur Kovar est un vrai mentor. Son objectif n’est pas de former des disciples, mais de s’engager de manière critique et honnête avec les idées de ses thésards, pendant les « rendez-vous de thèse », en enrichissant leur réflexion. Cette méthode prend généralement la forme des questions sur le raisonnement poursuivi par le thésard, suivant ce que les américains appellent la méthode socratique d’éducation. Pendant ma carrière étudiante le professeur Kovar a été le professeur qui a usé de cette méthode le mieux. Cela a marqué mon expérience d’enseignement et j’essaie de la pratiquer avec mes propres étudiants en thèse á Londres ou dans les autres endroits où j’enseigne. Le manque de prétention intellectuelle, qui est essentiel si on veut la méthode socratique de fonctionner, le pragmatisme ambitieux, le franc-parler (no nonsense talk) du professeur Kovar m’ont accompagné durant ma thèse, mais aussi au-delà, dans ma carrière universitaire : suivre son exemple est toujours mon objectif. Et enfin, quel plaisir d’avoir comme directeur de thèse un des grands Européens, qui ont formé une école de pensée en droit communautaire et à laquelle je me sens appartenir. Et cela même si je ne suis pas d’accord avec lui que « l’Europe s’arrête là ou s’arrêtent les cathédrales gothiques » !
Professor Ioannis Lianos, Chair, Global Competition Law and Public Policy, Director, Centre for Law, Economics and Society, Faculty of Laws, University College London, l’avant dernier thésard du Professeur Robert Kovar, cf. notre infographie
J’ai rencontré le Professeur Robert Kovar alors que j’étais étudiant en DESS de propriété industrielle à la faculté de droit de Strasbourg. Il assurait un cours consacré à l’articulation entre le droit européen et les droits de propriété intellectuelle. J’ai d’emblée été enthousiasmé par la matière et par la manière – à la fois vivante et précise – suivant laquelle elle était enseignée. Aussi ai-je choisi de rédiger mon mémoire sous la direction de l’intéressé, dont les étudiants craignaient parfois la sévérité.A l’issue du diplôme, alors que j’envisageais de travailler dans le secteur privé, j’ai néanmoins eu envie de poursuivre un travail de recherche sous la direction du Pr. Kovar. Dans mon esprit, la thèse projetée (qui portait sur un sujet relativement limité croisant le droit européen et la propriété intellectuelle) n’avait pas pour finalité de déboucher sur une carrière académique. Elle a, de fait, été rédigée en moins de trois années au cours desquelles j’ai pu apprécier tant la rigueur scientifique que la capacité tout à la fois d’analyse et de synthèse du Pr. Kovar, dont je retiens encore l’extrême disponibilité, la gentillesse ainsi qu’un grand sens de l’humour. C’est à cette expérience sous sa direction que je dois la réorientation de mes choix professionnels vers l’enseignement et la recherche.
Jean Luc Piotraut, Maître de conférences HDR (spécialisé en droit international et comparé de la propriété intellectuelle) Université de Lorraine
D’autres témoignages suivront!!!